Si vous êtes fans de littérature africaine, ou que vous avez tout simplement envie de découvrir les codes et paysage des écrits africains, je vous conseille d’inclure Régina Yaou sur votre liste.

C’est une auteure qui me fascine, tant par son imagination et sa narration que je trouve simple et touchante. Frustrations, tristesse, révolte, empathie, et plusieurs autres émotions me saisissent à chaque fois que je la lis. De ses trois livres que j’ai lu avec empressement, j’en garde un bon souvenir.

Indésirable, Dans l’antre du loup et Le glas de l’infortune, dont je vous parle aujourd’hui.

Le glas de l’infortune, l’histoire

Dans un village côtier de la Côte d’Ivoire, dans les années 1900, le narrateur nous conduit dans l’intimité de Mambo et de sa famille.

Mambo est un homme à qui rien ne semble réussir. En plus de ses affaires qui ne prospèrent pas, lui et sa femme N’Drin ont perdu cinq enfants, morts en bas âge. Il ne leur en reste que deux.

Las des commentaires des autres villageois, Mambo décide de prouver qu’il est lui aussi un homme qui peut réussir dans les affaires. Il a donc la splendide idée de mettre sa fille, Métchi en gage, en échange d’une somme d’argent à investir. Malgré le refus et les larmes de sa femme, Métchi est donnée captive dans un village voisin.

Le temps passe, Mambo prospère et ne se décide toujours pas à entamer le remboursement de sa dette. De l’autre côté, on a une N’Drin qui sombre de jours en jours, et malgré sa lutte pour revoir un jour sa fille, la machine infernale du destin semble courir plus vite.

Dans ce récit, on chemine avec l’angoisse d’une mère, un suspens qui se veut insistant.

Mais il y a aussi des sentiments humains, de la solidarité, de l’amitié et de la détermination.

La force des liens familiaux

Le glas de l’infortune est une tragédie à première vue. Mais quand on regarde un peu sous la surface, on voit la puissance des liens qui unissent certains des personnages.

J’ai été édifiée par la relation entre N’Drin et sa sœur Bahanan. Cette dernière voit N’Drin perdre plusieurs enfants, et elle est encore là lorsqu’on lui arrache sa fille.

Au delà du lien familial, Bahanan a fait le choix d’être une amie et une aide pour sa sœur. Soutien moral, soutien financier, soutien physique, elle n’a pas lésiné sur les moyens.

Sans elle, N’Drin n’aurait pas survécu face à ces difficultés.

Il y a aussi la relation entre N’Drin et sa fille Métchi. Séparées, elles n’ont jamais cessé de croire qu’elles pourront se retrouver, un jour. Elles n’ont jamais douté des efforts et des sentiments de l’autre.

L’amour, le sacrifice d’une mère

N’Drin est l’illustration même de tout ce que la plupart des mères sont.

Dès le début, elle se disait en elle que sa fille lui était peut-être arrachée pour toujours. Mais malgré ce présentiment, elle n’a eu cesse de lutter et de croire en ses efforts pour changer les choses.

N’Drin a frappé à toutes les portes, elle a supplié. Elle a pleuré jusqu’à ne plus avoir de forces. Du lever du soleil jusqu’à son coucher, ses prières et pensées se portaient sur ses enfants. Surtout sur Métchi, grandissant loin d’elle.

Une mère, quoiqu’elle dise, met toujours ses enfants avant elle. Et c’est ce que N’Drin a fait.

Le mot sacrifice prend son sens avec elle, et jusqu’au bout, elle va penser au bien être de ses enfants avant le sien..

Le glas de l’infortune, ou l’égo démesuré d’un homme

Je savais déjà que l’orgueil pouvait détruire et ruiner. Mais avec Le glas de l’infortune, j’ai réalisé à quel point ne pas savoir demander de l’aide peut-être ravageur.

Dans ce contexte, on peut aussi comprendre que c’était une époque où les hommes n’avaient pas droit à l’erreur. En effet, ils ne pouvaient exposer leurs faiblesses, au risque d’être la risée des autres.

Mais face aux enjeux et à ce qui est mis sur la balance, on doit pouvoir faire fi de notre égo et accepter de demander de l’aide lorsqu’on y arrive plus.

Le glas de l’infortune, est une œuvre percutante. Je ne lui trouve aucun défaut, mais il en relève certainement de ma sensibilité.

J’ai aimé le lire et je suis sûre qu’au delà de la tragédie, ce livre va vous marquer.